Easy rider Seward Highway, Alaska, Etats-Unis

11/05/2013

Mercredi 8 mai : 3h de vélo, 48km parcourus

L'hiver prend tellement ses aises cette année, que la réponse est la même quelle que soit la porte à laquelle je frappe dans la péninsule Kenai : "Trop tôt pour sortir les canoës, les lacs sont encore gelés, et les rivières pas tout à fait libres". On me dit d'attendre quelques jours, mais j'ai le sentiment que l'attente risque d'être plus longue. Et puis j'ai trop de fourmis dans les pattes, cette impulsion du matin qui me pousse à avancer. "Keep going !" comme dit l'ami Nico. "Cap au Nord !" que je réponds. Non pas que la situation soit meilleure là-bas, mais les jours de vélo qui me seront nécessaires pour remonter dans le centre de l'Alaska ouvriront sûrement d'autres rivières, dans la toundra arctique.

Je profite encore un peu du grand soleil au dessus de Seward, repoussant l'heure du départ. Ce n'est pas le manque d'envie d'enfourcher le vélo, c'est juste que j'attends que le vent tourne du Nord au Sud. Et en milieu d'après-midi, mon train est là, je n'ai qu'à me mettre devant la locomotive : super pour attaquer 20 kilomètres de bosses et de montée. Quand j'arrive sur le plateau du Kenai, le lac Primrose a gagné depuis mon dernier passage un peu plus d'éclat turquoise, la couleur des lacs glaciaires chargés de sédiments; elle remplace progressivement la couleur blanche de la glace. Je pose ma tente auprès d'une rivière, et je m'adosse à un arbre pour profiter des derniers rayons du soleil et de la chaleur du feu qui crépite devant moi.

Jeudi 9 mai : 8h de vélo, 142km parcourus

Allez tiens v'là une petite hypoglycémie ! Il va falloir que je me ravitaille plus régulièrement désormais, à cause des efforts plus importants dûs au dénivelé, et du vent qui freine plus ma course qu'il ne l'accompagne ... et mes réserves de graisse qui sont au plus bas. Une banane, 3 tortillas généreusement recouvertes de beurre de cacahuètes, et je peux rallumer le moteur, le carburant brûle de tout bois, les jambes retrouvent leur rythme pour une heure et demie au moins.

Je descends sur la baie du Cook Inlet, et je fais un détour par Girdwood. C'est la seule ville des environs, et moi j'ai besoin de trouver une laverie, afin de dissiper l'odeur d'ours qui suit ma route depuis quelque temps. Et je ne tombe pas n'importe où : la laverie automatique classée n°1 aux Etats-Unis en 2012. Machines à laver, sèches linge, toilettes, douches, tables, jeux, snacks, machine à café, connexion internet ... Je ne suis pas ici pour la fioriture, c'est le grand ménage pour moi, en 2 heures j'essaie de rendre l'ensemble présentable. Il y a même un coiffeur qui jouxte la laverie. J'hésite un moment, pourquoi ne pas nettoyer ma barbe de 5 semaines ... Au final, je décide de garder mes poils, quelque chose me dit que l'hiver n'est pas fini ici et que je vais encore en avoir besoin.

Je pose ma tente sur un promontoire au dessus de la baie. Vue magnifique, mais coincé au bas de la montagne sur une étroite portion de terre entre la ligne de chemin de fer et la route. Les moustiques et les boules quiès sont là pour assourdir le bruit de fond.

Vendredi 10 mai : 3h30 de vélo, 53km parcourus

Le piéton passe au vert, j'avance mon vélo pour traverser la large avenue, quand un pick up me coupe la priorité et accélère en poussant à fond son V8. Je souris, je suis enfin rassuré. J'ai rencontré jusqu'à aujourd'hui tellement de conducteurs civiques et respectueux de mon vélo, me donnant la priorité alors que je ne l'avais pas, que j'ai cru un moment que les américains avaient un gêne différent du nôtre. Celui de la courtoisie au volant. Ce n'est heureusement pas le cas. Juste une question d'éducation. A moins que ce conducteur pressé ne soit étranger. A moins que cela ne soit le fait que je rentre dans la plus grande ville d'Alaska, Anchorage et ses 400000 habitants, et que l'on y rencontre plus d'incivilités que dans le bush alaskan.

Je m'arrête sur la piste cyclable (et piétonne) pour demander mon chemin à un gars. Il me baragouine un truc que je ne saisis pas, en roulant drôlement ses yeux. Un "homeless", bourré à midi. Il n'y a que les SDF pour marcher dans la rue, tous les gens se déplacent à bord de voiture. C'est assez saisissant ce contraste, cette ville tellement étendue (20 kilomètres de long), et ces rues vides de gens. Des centres commerciaux, des magasins, et encore des centres commerciaux. A se demander où vivent les gens. Dans les centres commerciaux sûrement, vu que le shopping est le sport numéro 1 des américains. Déprimant.

Bien tiens, pour me réconforter je vais fêter mon arrivée à Anchorage par un restaurant. Un petit Taco King, avec des fajitas et un burrito, des tortillas chaudes, un "nada mas ?" par le caissier et un "tiene amigo !" par le serveur. Viva Mexico !

Samedi 11 mai : Rando, pas de vélo !

Sage, mon hôte du soir, me montre par la fenêtre de son salon un sommet qui surplombe Anchorage. "Ca te dit de le grimper ?". "Bien sûr" je lui réponds. C'est un truc qui me fait triper, choisir depuis son chez-soi ta course de la jounée en contemplant par la fenêtre une chaîne de montagnes. 4 heures de montée plus tard, nous voilà au sommet du Peak Wolverine, 1000m, je ne vois pas la maison de Sage, mais j'ai sous les pieds toute la ville d'Anchorage au bord du Golfe d'Alaska, et à l'horizon la chaîne de montagnes de l'Alaska Range. Somptueux.

Mais Sage n'est pas du genre à se prosterner devant un panorama. On descend de la montagne à grandes enjambées dans la neige ramollie car le programme de l'après-midi est chargé : un passage à la brocante des livres pour professeurs, où elle donne généreusement tout le matériel dont elle ne se sert plus; un saut au jardin collaboratif du quartier, où elle assure à l'organisatrice sa future présence; une descente à la boulangerie, aux accents français et à la clientèle embourgeoisée, on le comprend au vu des étiquettes de prix; et enfin un atterrissage chez son amie la fromagère, qui me fait sentir l'air du pays en me faisant goûter camembert, comté, et brebis du pays basque.

Me voilà donc avec mon pain aux noix/raisins sous le bras et mes morceaux de fromage français, la seule faute de goût de la journée sera le vin australien qui acccompagnera le tout. C'est la touche d'exotisme pour une terre d'antipodes.

Jéjé

Pris sur le vif

Déjà parcouru

     1186 km      17053 km
     168 km      232 km
     6342 m (6)


Où sommes nous ?


Date : 13/08/2014
Lieu : Saugnac et Cambran, France
Déplacement : Repos
Direction :

Sur la carte ...

Votre dernier message

, le 08/09/2023


Tous les messages