BTT, calor, arbolito y pampa Buenos Aires, Argentine

18/01/2014

Mercredi 15 janvier, 8h30, Aéroport de Buenos Aires, 23°C

Il y a de quoi s'inquiéter quand on est une fille ici. La concurrence est féroce. Des mini-short, des mini-bustiers, des mini-tissus, des maxi-décolletés et des maxi-moulants. Et toutes avec le même port altier qui les font passer sans un battement de sourcil au travers de foules de jeunes ou vieux machos qui sans vergogne ni retenue, matent, commentent, évaluent. A côté de ce beau monde, avec nos sandales et nos fringues de sport élimées, on passerait presque pour une bande de moines jésuites en mission d'évangilésation. Rien pour faire tourner l'oeil de l'argentin lambda.

Mercredi 15 janvier, 17h45, Canaglia Bicicleteria, 32°C

On tombe d'accord avec mon binôme sur notre prochain mode de voyage. Malgré le relatif inconfort, on achètera non pas un tandem :o), mais 2 BTT. Bicicleta todo terreno. En frances, se dice VTT. Deux raisons. Parce que le choix en VTC de qualité est limité. Et parce que les routes patagones vont nous proposer des centaines de kilomètres de "ribio", cette surface de terre et de gravillons, irrégulière et cassante. Autant partir sur des vélos robustes.
On se renseigne sur l'emplacement des échoppes à vélo du coin, et on part arpenter le trottoir de Buenos Aires. Au bout du quatrième magasin, on tombe amoureux d'un VTT, qui semble être le bon compromis de nos exigences : qualité, possibilité d'équipement, prix. Dommage que le vendeur ait une tête de filou. Car rien qu'à son allure, on a l'impression que le vélo va tomber en morceaux une fois le pas du magasin franchi.

Mercredi 15 janvier, 20h00, Calle Florida, 28°C

Sous un porche d'une rue passante, on trouve une vieille mamie, qui nous sussurre à l'oreille "Cambio, Cambio ! Dolares, Euros, Reales !". Comme des dizaines de ses compatriotes. On est ici dans l'épicente du marché noir du change de monnaie. Tu fournis des devises étrangères, en retour tu as de la monnaie locale (le peso argentino). Et à un taux plus avantageux que le cours "officiel". Pour un euro, à la banque, à une casa de cambio officielle, ou par carte Visa, le change est à environ 9 pesos pour 1 euro. Ici c'est 13,5 pesos pour 1 euro. 50% de pouvoir d'achat en plus.
Petite explication : le gouvernement essaie de maintenir sa monnaie à un cours artificiellement élevé, pour favoriser l'importation de matières premières à un coût réduit. D'un autre côté, pour maintenir l'économie, la planche à billets tourne. D'où un décalage grandissant entre la valeur officielle et réelle de la monnaie. Du coup, l'inflation est galopante : les argentins voient leur monnaie se déprécier, et veulent l'échanger contre des devises étrangères, dollars ou euros de préférence. Le gouvernement ayant largement restreint les possibilités d'achat de devises extérieures dans le pays, les locaux ont donc massivement recours au marché noir pour cela. Alors qu'elle commençait à sortir la tête de l'eau en ayant réduit le taux de pauvreté de 50% à 20% en dix ans, l'Argentine est en train de glisser doucement vers la même catastrophe économique qu'en 2001. A moins qu'une nouvelle dévaluation ne la sauve à temps.
Le lendemain, même mamie, mais change différent : 13,8 pesos pour 1 euro.

Jeudi 16 janvier, 11h00, Bike Shop Bicicleteria, 28°C

Nouvel essai, cette fois-ci transformé. On trouve notre bonheur dans un local qui pue l'huile, la rouille, la gomme de pneu et la transpiration. Dans un fatras incroyable de bicyclettes en réparation, on repère une vingtaine de modèles neufs. Et deux d'entre eux semblent être taillés pour nous. Berga fait une croix sur ses préférences de couleur (en choix optionnel elle ne le voulait pas rose, dommage). Le gars est prêt à nous les équiper de porte bagages, béquille et porte bouteille pour demain après-midi. Et avec des sacoches rutilantes pour Berga. Bingo.
On fête ça avec nos premières empenadas (sorte de chaussons fourrés avec au choix de la viande, du fromage ou des légumes), une pinte de Quilmès (bière nationale argentine), et un pas de tango (dansé par des vrais professionnels) à un coin de rue.

Jeudi 16 janvier, 16h00, Auberge Florida Suite, 25°C avec la clim

La température monte dehors, et ce n'est pas près de s'arranger. Apparemment on va atteindre des records pour le week end : 38 à 40°C. Avant de rechuter brutalement en début de semaine prochaine, de plus de 15°C. "On n'y comprend plus rien à ce temps" nous dit un gars. En attendant, mieux vaut faire comme les vieux ici, passer l'après-midi dans une confeteria, le salon de thé local, à manger des viennoiseries et boire un cafe con leche.

Vendredi 17 janvier, 11h00, Calle Lavalle, Buenos Aires, 28°C

Le cours du peso argentin continue sa longue dégringolade. Ce matin, au marché parallèle, 14 pesos pour un euro. A ce rythme là, le pays va être saigné à blanc avant la fin de l'année. Nouveau "arbolito" (changeur de monnaie dans la rue), car notre mamie est au repos : je suis moins en confiance, j'utilise donc la vieille méthode, qui consiste à appâter le vendeur en lui disant que je ne veux changer que 100 euros et que je reviendrai plus tard pour en changer bien plus. Histoire de décourager le gars de me filer des faux billets d'entrée.

Vendredi 17 janvier, 17h15, Terminal de bus El Retiro, Buenos Aires, 34°C

On cherche un bus pour nous amener au pied des Andes, on démarrera de là notre périple à vélo. Cela fait 4 compagnies de bus où le guichetier m'explique qu'il refuse de charger nos vélos s'ils ne sont pas correctement démontés et emballés. "Correctement" ? On n'a rien sous la main pour faire "correctement". Après consultation avec Berga, j'en fais une histoire personnelle. De toute façon je n'ai rien d'autre à faire, que de les emmerder assez pour les faire craquer. La fêlure apparait à 18h23, un énième employé d'un énième guichet me lâche que si je paye un petit supplément et que j'arrive à emballer les vélos avec du film plastique comme on le fait pour les bagages, la compagnie "Via Bariloche" acceptera de tout nous charger.
Je m'enfonce dans la faille, on court dans tous les sens pour régler les détails d'emballage, je lâche quelques pourboires à droite à gauche, on transpire à grosses gouttes. 19h14 : le bus moderne et climatisé démarre, on est dedans, trempé, les vélos dans la soute.

Samedi 18 janvier, dans le bus, 7h00, 20°C avec la clim

Soleil levant. Ligne droite. J'aurai pu dire "Longue ligne droite", mais ça n'a pas de sens. Cela fait plus d'une heure, que le bus qui nous transporte vers Neuquen n'a pas dévié sa course d'un degré. Sud-sud-ouest. Sans l'ombre d'un relief.
Au milieu de la pampa, il n'y a rien à l'échelle humaine. La nature a joué une version à la fois grandiose et minimaliste. Une végétation de bosquets et d'herbe rase, de la terre flétrie par la sécheresse. A perte de vue, deux couleurs. Le vert jauni du sol, le bleu pâle du ciel.
10 lieues plus loin, on rentre dans un "village". Une dizaine d'habitations de terre cuite. Un comedor (un restaurant), una panaderia (boulangerie), una carniceria (une boucherie), una pension (un hôtel), una estacion de gasolina (une station essence). Et puis une case minuscule, avec écrit dessus "Gobierno de la Pampa", "Gouvernement de la Pampa". Si on rapporte les frais de fonctionnement à l'étendue de la terre administrée, on doit frôler un record d'économie. Bienvenido en Argentina.

Jéjé

Pris sur le vif

Déjà parcouru

     1186 km      17053 km
     168 km      232 km
     6342 m (6)


Où sommes nous ?


Date : 13/08/2014
Lieu : Saugnac et Cambran, France
Déplacement : Repos
Direction :

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